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Citron.

Moi, je suis dur de la langue.

Inès.

Tu t’es piqué… Tu crois sans doute que je t’aime médiocrement ?

Citron.

Moi aussi, à la rigueur, je t’aime assez… mais puisque mon maître part, je le suis.

Inès.

Tu vas dans ce gouffre de Madrid ?

Citron.

Hélas ! oui.

Inès.

Vous allez vous y perdre.

Citron.

Tu peux être sûre que je n’y parlerai à aucune femme. Adieu. — Ne pleure pas.

Inès.

Que m’enverras-tu de Madrid ?

Citron.

Un carrosse à quatre chevaux[1].

Il sort.
Inès.

Qu’allons-nous devenir maintenant ?

Léonarda.

Ô souvenir, souvenir doux et cruel ! tu vis dans mon âme, mais tu n’y vivras pas longtemps. — Inès, je vais mourir.

Inès.

Soyez raisonnable.

Léonarda.

Ce départ imprévu va me tuer. — C’est don Louis qui en est cause. Don Juan se conduit en homme d’honneur.

Lisène.

Eh bien, ma chère, qu’a répondu don Juan ?

Léonarda.

Qu’il vous prie de vous mettre à la fenêtre pour le voir partir ; qu’il sera demain matin à Madrid, et que là vous pourrez lui écrire votre avis sur les moyens de conclure ce mariage.

Lisène.

Il part, dites-vous ?

Léonarda.

Pour éviter un péril qui le menace.

Lisène.

Je lui en veux de me quitter sans m’avoir fait ses adieux.

  1. Citron dit seulement un coche (un coche, un carrosse). Les carrosses étaient alors peu communs. Nous avons ajouté les quatre chevaux pour tâcher de reproduire l’effet.