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Henri.

Je ne vous connais pas. — Ce n’est pas vous que j’aime. Celle que j’aime, celle que j’attendais, c’est Dorothée, c’est la Belle aux yeux d’or… Cet espoir trompé redouble ma folie. J’en mourrai !

Il sort.
Marcèle.

Quel mépris ! Mais qu’importe ! mieux vaut l’amour d’un aimable cavalier que celui d’un prince ou d’un roi !




JOURNÉE TROISIÈME.



Scène I[1].

Dans le palais.


Entrent LE ROI et DON ARIAS.
Le Roi.

Eh quoi ! ce n’était pas la dame qui cause la mélancolie de mon frère Henri ?

Arias.

Cette aventure, sire, mériterait qu’on en composât un poëme. Comme je le disais à votre majesté, tout a été donné par erreur à Marcèle.

Le Roi.

L’aventure est curieuse !

Arias.

Tout à fait bizarre.

Le Roi.

Voilà des cadeaux singulièrement placés.

Arias.

Si ce n’étaient cadeaux de roi, qu’on ne peut reprendre, je les lui aurais fait redemander.

Le Roi.

Cela ne serait pas juste. Elle a bien gagné ce qu’elle a. Je souhaite que cette méprise lui donne autant de satisfaction qu’elle peut causer d’ennui et de mal à don Henri.

  1. Nous réclamons l’indulgence du lecteur pour la scène qui va suivre. Notre intention était de l’abréger beaucoup, et de n’en donner en quelque sorte que le dessein général, surtout à compter du moment où l’infant don Henri et la vieille Théodora paraissent sur le théâtre. Mais plusieurs de nos amis, qui ont tout pouvoir sur nous, ont exigé qu’elle fût traduite en son entier, comme les autres, en nous représentant qu’il ne nous était pas permis de modifier à ce point, sous quelque prétexte que ce fût, le poète que nous voulons faire connaître : et nous nous sommes exécuté. Heureusement qu’il n’y a pas dans les comédies de Lope beaucoup de scènes de ce genre ; sans quoi nous aurions renoncé à ce travail.