Page:Lope de Vega - Théâtre traduction Damas-Hinard tome 2.djvu/250

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Léonel.

C’est juste ; pas de billet. Mais je crois que vous devriez faire à Marcèle un cadeau des bijoux que Dorothée vous a renvoyés. Et si celle-ci vient à les voir, elle enragera.

Don Juan.

Elle les verra ; car elles se rencontrent à l’église les jours de fête.

Léonel.

Voilà, seigneur, une belle vengeance.

Don Juan.

Ce soir vous viendrez tous deux avec moi ; et afin que les choses aillent plus vite, je la comble de cadeaux.

Léonel.

Alors vous serez bientôt vengé.

Chacon.

Quant à moi, toujours prêt à vous servir ; et si Marcèle vous plaît, que la Belle aux yeux d’or s’en aille à tous les diables !

Ils sortent.



Scène III.

Dans le palais.


Entrent LE ROI, LE GRAND MAÎTRE et DON ARIAS.
Le Roi.

Où est mon frère ?

Le grand Maître.

Il ne se porte pas bien. Depuis hier au soir il est dans un abattement qui le rend insensible à tout.

Le Roi.

Henri, dans l’abattement !

Le grand Maître.

C’est l’ouvrage d’une belle dame, très-honorable et très-noble.

Le Roi.

Grand maître, l’amour est bien puissant. Que de chagrins il a causés ! combien de malheureux il a fait périr !… Cette femme est-elle en Castille ?

Le grand Maître.

C’est elle que vous avez vue la nuit, chez elle…

Le Roi.

Quoi ! en deux jours elle s’est emparée à ce point du cœur de l’infant ?

Le grand Maître.

Oui, sire.

Le Roi.

Vous viendrez tous deux avec moi cette nuit chez cette dame. Je veux, par mes présents, réduire cette beauté farouche, et rendre le repos à Henri.