Page:Lope de Vega - Théâtre traduction Damas-Hinard tome 2.djvu/245

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Don Félix.

Dites-le donc.

Marcèle.

La belle chérie de don Félix.

Ils sortent.



Scène II.

Dans la maison de don Juan.


Entrent DON JUAN et LÉONEL.
Don Juan.

Cela s’est passé comme je te le raconte.

Léonel.

C’est une aventure fort singulière.

Don Juan.

Personne ne me l’a dit ; moi-même je l’ai vu, et j’en ai été assez troublé, assez honteux. Le roi a donné une chaîne d’or ; le grand maître, des reliques de prix… mais l’infant est celui qui a montré le plus d’amour.

Léonel.

Sans doute. Le souvenir en est la preuve.

Don Juan.

Oui, c’est ce maudit souvenir qui trouble le mien et qui fait le tourment de mon imagination.

Léonel.

Quand un amant a vu pareille chose, il doit être guéri.

Don Juan.

Oui, si l’on peut guérir jamais du mal d’amour, si un captif peut jamais devenir libre, je suis guéri et je suis libre !… Hélas ! je ne croyais jamais sortir d’esclavage, et je gémissais dans les tristes fers dont j’étais chargé ; car cette chaîne d’or n’en était ni moins pesante ni moins dure. Mais la Merci et la Trinité[1] se sont réunies pour payer ma rançon ; et grâces à elles, et grâces à Dieu, je reviens d’Alger, et me retrouve enfin en Espagne parmi des chrétiens !

Léonel.

Il faut espérer, monseigneur, que cette expérience vous rendra plus sage à l’avenir.

Don Juan.

C’est fini pour la vie. J’ai aimé tant que j’ai cru que l’on m’aimait. Mais sa trahison a tué mon amour.


Entre UN PAGE.
Le Page.

C’est un écuyer de dame Dorothée qui désire parler à vous.

  1. La Merci et la Trinité étaient deux ordres religieux qui s’occupaient du rachat des captifs.