échoué des docteurs qui ont pâli sur les aphorismes d’Hippocrate[1] ?
Oui, monseigneur, vous avez blâmé un peu légèrement. Dorothée n’est pas un puits de science, et ne prétend pas lutter avec Homère ou Virgile : elle écrit comme on écrit à la cour et dans le beau monde… Mais la voici ; elle s’avance parmi tous ces anges qui sont venus visiter les salles de l’Alcazar… Je dis les anges, quoiqu’ils n’aient pas d’ailes… La voilà qui entre dans le jardin.
Ô charmante belle ! ta blancheur égale celle de la fleur d’oranger, du jasmin et du lis ; et je la préfère au vif incarnat de la rose. Déjà en Castille ta renommée avait commencé de troubler mon cœur, et ici ta vue m’a ravi l’âme !
Cela étonne votre altesse ?
Ce n’est pas ce que je vois ici qui m’étonne. J’ai été plus surpris ailleurs.
Fameuse est la Giralda de Séville qui porte un écu, un calice et une palme[2]. Mais votre altesse n’a pas besoin de sortir d’elle-même pour admirer.
Arrêtez, n’allez pas plus loin.
Je m’en retourne. J’ai vu maintenant tout ce que je voulais voir.
Qu’étiez-vous donc venue voir ?
Les richesses du palais, l’élégance et la beauté du jardin, où nature a répandu d’une main prodigue ses dons les plus brillants. Vous êtes l’abrégé de tout cela.
Comment ?
Je vois en votre personne toute l’élégance, et dans votre esprit toutes les fleurs du jardin.
Ah ! femme céleste ! trésor divin ! — Quels sont donc les fous qui vous ont surnommée la Belle aux yeux d’or ?
- ↑ Tout ce passage, qui a une certaine importance comme renfermant l’opinion de Lope sur la poésie, a été omis, ainsi que beaucoup d’autres, par le précédent traducteur.
- ↑ La giralda (girouette) est une statue de métal qui sert à indiquer le vent. La giralda aujourd’hui porte un drapeau au lieu du calice. Nous croyons toutefois que la description qu’en donne Lope devait être exacte au dix-septième siècle.