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neurs à Ongol, et aussi de ce que tu as enlevé la femme d’un autre… Ce qui n’est permis à personne, non pas même à un cacique ou à un roi. (À part.) Je prêche à merveille… mais ce n’est pas pour moi.

Dulcan.

J’enrage… je suis au désespoir !

Terrazas.

Je le conçois. Mais tu dois comprendre aussi qu’il est juste qu’elle retourne auprès de son mari.

Dulcan.

Comme elle a mal reconnu ce qu’elle devait à mon amour !… comme elle a mal récompensé mes soins ! — Il est vrai que toutes les preuves de tendresse ne sont comptées pour rien par qui n’aime pas. — Ils ont pris le chemin de Hayti ?

Terrazas.

La crainte les a fait entrer dans la forêt.

Dulcan.

Y sont-ils encore ?

Terrazas.

C’est là que je les ai vus.

Dulcan.

Dis-moi, pourrais-je me tenir sur un de vos chevaux ?

Terrazas.

Pourquoi ?

Dulcan.

Pour les poursuivre.

Terrazas.

Tu aurais tort. C’est demain le jour de la messe que doit célébrer notre père, et pour rien au monde tu ne peux t’exempter d’y paraître. Toi, le chef, le roi de ce pays, tu donnerais, en y manquant, un mauvais exemple qui produirait du scandale ; car nous autres Espagnols, nous avons l’habitude de dire que les rois sont des miroirs où les vassaux voient la conduite qu’il doivent suivre. Si tu ne venais pas, outre que le ciel en serait grandement offensé, tu fâcherais Barthélemy Colomb, et le roi d’Espagne, en apprenant cela, bouleverserait toute la contrée qui est derrière la mer d’Occident. Mais je te donne ma parole que, la messe célébrée, je t’accompagnerai avec mon épée et ma foudre, et te seconderai dans tes recherches.

Dulcan.

Tu t’engages à me faire retrouver mon épouse ?

Terrazas.

Je m’engage à te la ramener.

Dulcan.

Il suffit, Rodrigue. — Quand vient le Père ?

Terrazas.

Je crois que demain il sera ici.