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Colomb.

Eh bien, je pensais que le sage qui est pauvre meurt ici-bas sans gloire.

L’Imagination.

Non pas : j’entends d’ici retentir la trompette de la Renommée qui t’appelle.

Colomb.

Je veux retourner dans ma patrie, car je n’ai personne ici qui me veuille protéger.

L’Imagination.

Tu peux compter sur l’Espagne aussitôt que la guerre sera terminée.

Colomb.

Mon malheur me conseille de me retirer. Laisse-moi aller enfin goûter quelque repos.

L’Imagination.

Je ne puis te laisser. Il faut que je t’emmène avec moi.

Colomb.

Où veux-tu me conduire ?

L’Imagination.

Attache-toi à moi fortement.

Colomb.

Arrête, Imagination. Veux-tu donc me pousser au désespoir ?

L’Imagination.

Viens, viens avec moi. Partons.

Colomb.

Où donc m’entraînes-tu ?

L’Imagination.

En un lieu où tu apprendras si tu dois réaliser ton projet.


L’Imagination emporte Colomb, à travers les airs, de l’autre côté du théâtre. Une toile se lève, et l’on voit LA PROVIDENCE, assise sur un trône, ayant à sa droite LA RELIGION CHRÉTIENNE, et à sa gauche L’IDOLÂTRIE.
L’Imagination.

Sois attentif, Colomb ; car dans ce tribunal s’agite un débat qui t’intéresse.

Colomb.

Quel est ce juge assis sur cette estrade ?

L’Imagination.

C’est la divine Providence. À sa gauche est l’Idolâtrie, qui t’accuse avec sa vaine rhétorique, et de l’autre côté est la Religion chrétienne, qui te défend. (S’avançant vers la Providence.) Tes ordres sont exécutés, divine Providence : j’ai amené en ta présence le grand Christophe Colomb.

La Providence.

Que dis-tu, Idolâtrie ?