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Tello.

Il faut que je la tue.

Feliciana.

Arrête, mon frère, contiens-toi, de grâce !

Tello.

Prenez garde, Feliciana, ne me poussez pas à bout.

Feliciana.

Je vous en supplie comme femme, je vous en supplie comme sœur.

Tello.

Malédiction sur l’insensée qui, préoccupée d’un misérable amour, ose ainsi mépriser, dédaigner son seigneur, sans que rien puisse vaincre son orgueil ! Mais qu’elle n’imagine pas m’échapper. Elle sera à moi ou périra.

Il sort.


Entre CELIO.
Celio.

Je ne sais, madame, si je suis sous l’empire d’une vaine crainte, mais il se trame quelque chose. Nuño est occupé à recevoir des hôtes de qualité… Sanche est venu dans le village, et l’on dit qu’il est allé une seconde fois à la cour… Jamais il n’y a eu un pareil mystère dans cette maison.

Feliciana.

Tu aurais dû, Celio, puisque tu avais des soupçons, imaginer quelque prétexte pour entrer chez Nuño et voir ce qui s’y passe.

Celio.

J’ai eu peur de le fâcher ; il n’aime pas à voir les gens du château.

Feliciana.

Il faut que j’avertisse mon frère ; car ce jeune rustre ne manque ni d’esprit naturel ni de résolution, et qui sait ce qu’il aura tenté ? — Toi, Celio, demeure ici, et si quelqu’un venait, appelle-moi.

Elle sort.
Celio.

La mauvaise conscience est toujours craintive ; et, d’ailleurs, un crime comme celui de don Tello demande vengeance au ciel.


Entrent LE ROI, les Seigneurs et SANCHE.
Le Roi.

Entrez, et faites ce que j’ai dit.

Celio, à part.

Qui sont ces gens-là ?

Le Roi.

Appelez quelqu’un.

Sanche.

Cet homme, sire, est un domestique de don Tello.