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Tello.

Ah ! ce n’est pas une femme, une créature humaine ; c’est un monstre insensible. Autrement elle aurait pitié de ma peine… Écoute ; promets-lui de l’argent, de l’or, des bijoux, tout ce que tu voudras. Promets-lui adroitement un trésor. Promets-lui une robe de Milan toute brodée d’or de la tête aux pieds. Dis-lui que je lui donnerai des terres, des troupeaux, et que si elle était mon égale….

Feliciana.

Est-il possible, mon frère ? Est-ce bien vous qui parlez ainsi ?

Tello.

Oui, ma sœur, je suis dans une situation affreuse… Il faut que je meure ou que je la possède. Il est temps que, d’une manière ou d’autre, mes tourments aient une fin.

Feliciana.

Je vais la trouver de ce pas, bien que je ne compte pas beaucoup sur le succès de ma démarche.

Tello.

Et pourquoi ?

Feliciana.

Parce que, d’ordinaire, une femme qui a de la vertu ne cède point à de tels intérêts.

Tello.

Va vite, et rends-moi l’espoir. (À part). Mais une fois que j’aurai eu ce que je veux, mon amour fera place au désir de la vengeance.

Ils sortent.



Scène IV.

À Léon, dans le palais du Roi.


Entrent LE ROI, LE COMTE, DON ENRIQUE et le Cortége.
Le Roi.

Tout se dispose à Tolède pour ma campagne sur les Maures, et d’après les lettres du roi d’Aragon, je puis être tranquille de ce côté-là. — Voyez, comte, si tous les solliciteurs — citoyens ou soldats — ont reçu audience, et s’il n’y a plus personne qui veuille me parler.

Le Comte.

Tous ont été dépêchés.

Enrique.

Je viens de voir étendu devant la porte un paysan galicien qui paraissait bien affligé.

Le Roi.

Et qui donc se permet de fermer ma porte à un pauvre paysan ? — Allez, allez, Enrique de Lara, et vous-même amenez-le-moi.

Enrique sort.