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et de beignets ; que tous les étrangers y sont traités et régalés comme s’ils revenaient d’Italie, de Flandre ou de Maroc ; enfin que c’est un sac où la fortune réunit pêle-mêle toutes les pièces de l’échiquier, les noires et les blanches. Partons au plus tôt.

Sanche.

Adieu, mon père. Donnez-moi votre bénédiction.

Nuño.

Mon fils, tu as du bon sens et de l’esprit. Parle au roi comme il convient.

Sanche.

Ah ! soyez tranquille, je n’aurai pas peur devant lui pour redemander Elvire. — Allons, partons.

Nuño.

Adieu, Sanche.

Sanche.

Adieu, mon père. — Adieu, adieu, Elvire !

Pélage.

Adieu, adieu, mes petits cochons !

Ils sortent.



Scène III.

Une salle du château de don Tello.


Entrent DON TELLO et FELICIANA.
Tello.

Je ne pourrai donc venir à bout de cette beauté rebelle !

Feliciana.

Tello, ne vous obstinez pas ainsi. Ne voyez-vous pas qu’elle ne cesse de pleurer ? Ne comprenez-vous pas que, — la retenant en quelque sorte prisonnière dans cette tour, — alors même qu’elle vous aimerait, vous ne pourriez, par ce traitement, que vous attirer sa haine ? Vous êtes sans égard pour elle, et vous voudriez qu’elle vous fût favorable ! Vous ne lui montrez que de la rigueur, et vous voulez qu’elle vous écoute !

Tello.

N’est-ce pas pour moi un malheur et une honte !… me voir rebuté, méprisé, moi qui suis dans cette contrée le plus puissant, le plus riche, le plus généreux !

Feliciana.

Eh ! mon Dieu ! oubliez-la, — oubliez cette fille et votre fol amour.

Tello.

Ah ! Feliciana, il vous est bien aisé de parler, à vous qui ne connaissez pas l’empire de cette passion.

Feliciana.

Attendez jusqu’à demain. Je la verrai, je lui parlerai, je tâcherai de l’adoucir.