Page:Lope de Vega - Théâtre traduction Damas-Hinard tome 1.djvu/224

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
142
LE CHIEN DU JARDINIER.

Furio.

Dépêche-toi.

Tristan.

Ô puissance de l’amour paternel !

Furio.

Où t’attendrai-je ?

Tristan.

À la taverne de l’Orme.

Furio.

Adieu.

Tristan.

Voilà pourtant à quoi peut servir l’esprit ! — Reparaissons maintenant sous mon costume ordinaire, que j’avais gardé sous mes vastes habits, afin de pouvoir, au besoin, jeter sous une porte mon turban arménien et ma houppelande grecque.


Entrent LE MARQUIS et LE COMTE.
Frédéric.

Je vous réponds que c’est notre brave, celui qui devait nous débarrasser de Théodore.

Ricardo.

Holà ! cavalier, un mot. — Est-ce ainsi que l’on tient sa parole entre gens d’honneur ? et ne devrait-on pas réaliser plus vite une promesse que l’on a faite si aisément ?

Tristan.

Monseigneur…

Frédéric.

Nous regardez-vous, par hasard, comme vos égaux ?

Tristan.

Ne me condamnez pas sans m’entendre. — Je suis déjà entré au service de ce pauvre jeune homme, et bientôt cette main vous l’aura expédié. Mais le tuer ouvertement d’un coup d’épée serait vous compromettre ; et la prudence est un trésor céleste, — à tel point que les anciens en faisaient la première vertu. Théodore, n’en doutez pas, est un homme mort. Le jour et la nuit il vit retiré dans son appartement, en proie à la plus noire mélancolie, comme s’il pressentait la destinée qui l’attend. Rapportez-vous-en à moi, et ne précipitez rien. Je sais où et quand je dois lui donner son compte.

Frédéric.

Il me semble, marquis, qu’il a raison. Puisqu’il est entré à son service, c’est déjà quelque chose. Soyzz-en sur, il le tuera.

Ricardo.

Je n’en doute pas plus que vous.

Frédéric.

Parlons bas.

Tristan.

En attendant, mes chers seigneurs, n’auriez-vous pas sur vous