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et les sombres feuillages de la forêt qui se trouva comme enveloppée d’une douce clarté. Tout près de là, le ruisseau faisait entendre son gai murmure, pendant qu’au-dessus de la tête des deux femmes, les branches des arbres s’agitaient doucement sous le souffle de la brise du soir.

Le cœur d’Évangéline était rempli de pensées d’espérance ; mais, malgré elle, il s’y glissait un sentiment de souffrance et d’épouvante qui la glaçait d’effroi, tel le serpent froid et venimeux se glisse furtivement dans le nid de la craintive hirondelle. Ce n’était point une terreur terrestre ; il lui semblait qu’un souffle venu d’en haut flottait autour d’elle, et que, comme Lilineau, la jeune Indienne, elle aussi, était à la poursuite d’un spectre. Elle s’endormit sur cette pensée, et, pendant son sommeil, la crainte et le fantôme s’évanouirent.

Le lendemain, dès l’aube, nos voyageurs reprirent leur course, et, tout en cheminant, la femme schawnée leur raconta ceci :

« Là-bas, sur le penchant occidental des montagnes que nous voyons devant nous, se trouve un petit village, où demeure la Robe-Noire, le chef de la mission catholique. Il enseigne beaucoup de choses à ceux qui l’entourent ; il leur parle de Dieu,