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LES COMITADJIS

nent aux conjurés. Les villes donnent les premières. Les recrues sont groupées par dix, un chef à la tête. La discipline est farouche. Dans cette confrérie tous les péchés sont mortels. Aucun affilié ne doit connaître le nom des neuf avec qui il forme équipe. C’est la dizaine invisible. Personne n’a le droit d’interroger sur les projets de l’Organisation, ni d’en demander des nouvelles, encore moins de sembler croire qu’elle existe. Obéir simplement.

Le complot s’étoffe.

À Monastir, les grands initiés se rassemblent le soir, loin des troupes, dans les maisons, en amis, pour réchauffer l’espoir. Portes et fenêtres closes, sentinelle sur le seuil, ils chantent à voix retenue des airs patriotiques. Voici la chanson de la capture, sur le Danube, d’un bateau autrichien par la bande du poète révolutionnaire Christo Boleff. Quand ils arrivent à la phrase : « C’est moi le capitaine, ici », l’enthousiasme soulève la compagnie et chacun frappe du poing la table comme si, de sa demeure, le vali turc, là-bas, pouvait entendre.

Et le chant en l’honneur de Stephan Karadja, le révolté tombé en 1868, le front lumineux, l’âme fleurie, face à l’Ottoman qu’il brava :