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LES COMITADJIS

on saura où découcher… D’horizontale, Belgrade est devenue verticale. Elle a poussé subitement comme pousse un chapeau-claque.

Du bitume ! Vos pieds chéris glissent sur du bitume. Aussi, quand le petit doigt, au fond de son soulier, raconte aux quatre autres ce qu’il en était avant le traité de Neuilly, entend-on les cinq doigts éclater de rire au cours de la promenade !

Deux statues. L’une : le Vainqueur. Ce vainqueur devait se tenir pour l’éternité au milieu même de la cité, sur cette place où monte un petit jet d’eau. Il n’y est pas. Les mères de famille serbes n’ont pas voulu de lui. On n’est pas vainqueur sans avoir combattu et, dans les combats, on perd beaucoup de choses. Lui avait perdu sa culotte. Il était venu naïvement comme cela, sans penser à mal, dans la tenue où il se trouvait après avoir terrassé l’ennemi. Les mères serbes, aussitôt, lui lancèrent des cailloux.

— Voyons, mesdames, essaya-t-il de leur dire, ne me reconnaissez-vous pas ?

— Insolent ! répliquèrent-elles, on te reconnaît trop !

Elles le chassèrent, le poursuivant jusqu’au Kalimegdan. Sous la verdure, le Vainqueur se crut à l’abri. Il n’en fut rien. Lapidé, il fut poussé