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LES COMITADJIS

blement parti pour le grand rêve, fit quelques pas hors de la piste ; de tels cris l’avertirent de son erreur que, tambour battant, les amoureux revinrent se perdre dans la masse. Cette foule occupe la chaussée, en plus des deux trottoirs. Une automobile, le tramway demandent-ils le passage, elle leur en fait un, parce qu’elle est bienveillante et sans morgue. Aussitôt après, le flot qui s’était ouvert se referme. Les étudiants, en casquettes rouges ou vertes, sourient aux étudiantes en casquettes vertes ou rouges. On m’affirme qu’ils le font sans pensée défendue. Ai-je jamais dit le contraire ? En tout cas, la Bulgarie ne manquera ni de médecins, ni d’avocates, ni d’ingénieurs. Mais ne t’écarte pas de ton sujet, mon cher ami. À huit heures et demie, chaque soir, ce nuage humain s’éclaircit ; à neuf heures moins le quart, on en aperçoit encore des traces. Peu à peu, il s’évapore. Alors, autour des maisons, les corbeaux se disputent âprement la meilleure place pour la nuit, et c’est fini. Sofia-capitale est sous clé. Devant l’ensemble de ce spectacle, le poète pourrait s’écrier :

— Là tout est calme, ordre, beauté.

Poète, tu te tromperais.