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LES COMITADJIS

branié, dans le parc Boris. Parfois ils assistent à la sortie du Grand Théâtre. Ils fréquentent souvent la rue Ivan-Vasoff, parce que là est le club diplomatique. Dans l’une des salles de ce club on voit les portraits des hommes qui le présidèrent ; pourquoi n’y trouve-t-on pas ceux des intellectuels repérés à sa sortie et tués peu de temps après au mieux des circonstances ? On lirait sur le fronton du cadre : « Des gens qui auraient mieux fait de rester chez eux. »

Je ne comprenais pas, au début, pourquoi mes amis bulgares préféraient aller dîner partout plutôt que là. « On y mange bien », disais-je. « Mais on y digère mal », répondit le plus hardi.

L’attelage que l’on me présenta en liberté rôdait avenue Dondoukoff, devant le bar Phœnix, à midi. Les deux manuels — ceux qui manieraient le revolver — causaient comme si de rien n’était, au milieu des passants. De temps en temps, le « montreur » écrasait son nez contre la glace pour mieux fouiller la clientèle. Le manège dura une demi-heure. Las d’une attente vaine, le chef libéra ses hommes, d’un signe fait à dix pas. La victime venait sans le savoir d’obtenir un sursis. Et cela prouve qu’en Bulgarie, l’homme qui sait se priver d’apéritif, peut vivre quelques semaines de plus que son compte !