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le juif errant est arrivé

et quatre ans, les mains et les pieds enveloppés de chiffons, mais en chemise, et dont les cheveux, depuis qu’ils eurent le malheur de pousser sur ces têtes, n’ont certainement jamais été peignés, sont debout et grelottants contre un grabat. Il nous semble que le grabat remue. Nous abaissons les bougies. Une femme est là. Dans quoi est-elle couchée ? Dans des copeaux mouillés ? Dans de la paille d’étable ? Je touche, c’est froid, gluant. Ce qui recouvre la femme a dû s’appeler édredon, ce n’est plus qu’une bouillie de plumes et d’étoffe suintant comme un mur. Nous apercevons deux autres têtes dans la bouillie, de tout petits enfants, quatre mois, quinze mois. L’aîné sourit à la flamme que nous promenons autour d’eux.

La femme n’a pas dit un mot.

Nous avons réveillé le souterrain. Des habitants nous cernent dans le couloir. Nous devons entrer dans chacune des tanières. S’ils sont chez eux l’après-midi, c’est qu’ils n’ont pas d’habits pour aller dans la rue. Un seul est sorti pour tous, avec les souliers de l’un et le caftan de l’autre. Rapportera-t-il de quoi manger un peu ?

Enveloppé dans un châle, un Juif à grande barbe nous salue dans la pénombre. Il possédait une maison, le pogrome de 1918 la lui a brûlée, et