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le juif errant est arrivé

fer se balancent des petits paletots, des chapeaux, des chaussures, des caleçons, des gants. Les rues ont l’air d’être les couloirs d’une fantastique armoire vestimentaire dont les vêtements, aidés par le vent, secoueraient leurs puces sur le passant.

Ne croyez pas que vous ayez affaire à deux hommes voguant à l’aventure. Nous savons clairement, Ben et moi, où vont nos pas : ils vont chez les Sassner. Les Sassner ne sont pas de nos amis ; jamais ils n’ont entendu parler de nous, et nous n’avons entendu parler d’eux que depuis une heure. Mais j’ai recommandé à Ben d’être très poli et de me présenter comme un homme d’une douceur extrême, ainsi, peut-être ne nous mettront-ils pas à la porte.

Les Sassner sont de retour de Palestine. Ils vont jouer, pour la première fois devant nous, les sionistes écœurés.

Voilà leur boutique. Mme Sassner, que j’aperçois de la rue, a froid. Elle est ficelée dans un châle qui, visiblement, ne la réchauffe pas. Elle vend des harengs et des croissants saupoudrés de graines de pavot. Avant l’aventure, les Sassner possédaient un vrai magasin, strada Regina-Maria, et vendaient de la fourrure. De la peau de loutre à la peau de hareng, quelle déchéance !