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Lorsque, échappés à la poursuite, nous rejoignîmes l’automobile, nous aperçûmes un petit veau qui se cachait derrière. Brentwood nous recommanda d’avancer prudemment, et lui-même se mit à ramper comme un loup ou un tigre. Couteau et couperet étaient restés dans la bagarre, mais Brentwood avait toujours ses mains, et il se roula par terre avec la pauvre bête, jusqu’à ce qu’il l’eût étranglée. Nous jetâmes la carcasse dans la voiture, étendîmes une couverture dessus et reprîmes la direction de la ville.

Mais nos déboires ne faisaient que commencer. Un pneu éclata. Nous n’avions aucun moyen de le remplacer et le crépuscule tombait. Il fallut abandonner l’auto. Brentwood allait devant, soufflant et trébuchant, portant sur ses épaules le veau avec sa couverture. Nous nous relayions sous le faix et nous sentions à bout de forces : en outre, nous nous étions égarés. Pour comble, nous rencontrâmes une bande de vauriens. Ils n’appartenaient pas à la I. L. W., et je crois qu’ils étaient aussi affamés que nous. En tout cas, ils s’emparèrent du veau et nous octroyèrent la raclée.

Pendant tout le reste du parcours, Brentwood se démena comme un aliéné, dont il avait l’air avec ses vêtements en loques, son nez enflé et ses yeux au beurre