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pour inventer quelque subterfuge permettant à Frisco Kid de s’évader de ce milieu-là.

« Peut-être Pete me livrerait-il aux mains de la police, continua l’autre, ou m’enverrait-il dans un orphelinat ? Plutôt mourir que d’entrer là dedans ! Et puis Joë, je n’appartiens pas à ta classe, et tu le sais bien. Ignorant comme je suis, je souffrirais comme un poisson hors de l’eau. Non ; il me faudra attendre encore un peu avant de me trotter d’ici. Mais un conseil : retourne tout droit chez toi. À la première occasion, je t’aiderai à débarquer, et je règlerai moi-même ce compte-là avec Pete…

— Jamais de la vie ! interrompit avec chaleur Joë. Je ne veux pas que ma fuite te crée des ennuis. Inutile d’insister. De toute façon, je ficherai le camp et, si je vois un moyen de te tirer de là, tu m’accompagneras, ou plutôt, tu partiras avec moi, nous nous débrouillerons ensuite. Qu’en dis-tu ? »

Frisco Kid hocha la tête et, levant les yeux vers le ciel criblé d’étoiles, essaya de considérer en rêve une existence qu’il eût aimé vivre, mais qui lui était inexorablement interdite.

De son côté, Joë se taisait, tout absorbé par les graves problèmes de la vie qui se posaient devant lui, plus impérieux que jamais.

Un lourd murmure de voix leur parvint du Reindeer et, du rivage, les notes solennelles d’une cloche d’église s’égrenèrent sur l’eau tandis que la nuit d’été les enveloppait lentement de ses chaudes ténèbres.