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le voir de loin, il me fiche la frousse. Lui et ses copains manigancent, paraît-il, une grosse affaire dans les parages et ne cessent de solliciter le concours de Pete, qui, d’ailleurs, pourrait t’en raconter beaucoup plus long que moi sur ce sujet. »

Joë répondit d’un signe de tête et regarda d’un œil curieux s’approcher l’embarcation. Bien que de dimensions sensiblement plus grandes, le Reindeer était construit à peu près sur le même modèle que le Dazzler, établi pour gagner de la vitesse. Une grand-voile comme celle d’un yacht de course portant trois bandes de ris, en cas de gros temps. Dans la mâture comme sur le pont, tout était à sa place, rien de négligé ou d’inutile. Tout le grément, manœuvres courantes et dormantes, donnait l’impression d’un ordre parfait et d’une science nautique avertie.

Le Reindeer s’avança doucement dans la nuit tombante et mouilla l’ancre à un jet de pierre, Pete-le-Français en fit autant avec le Dazzler et monta dans le youyou pour rendre visite à ses amis.

Les deux jeunes gens s’allongèrent sur le toit de la cabine en attendant son retour.

Joë rompit le silence.

« Tu aimes cette vie-là ? »

L’autre pivota sur le coude.

« Oui et non. L’air frais, l’air salin et la liberté, à la bonne heure ! Mais ce qui me déplaît, c’est… »

Il fit une pause, comme si sa langue lui refusait tout service, puis il éclata :

« C’est… de voler.

— Alors, pourquoi ne quittes-tu pas ce métier-là ? »

Joë éprouvait envers son camarade beaucoup plus