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« Défense de débarquer ici ! hurla le militaire. Variole !

— Il faut que je débarque ! cria Joë, étouffant un sanglot et reprenant ses avirons.

— Si vous avancez, je tire ! » fut la réponse réconfortante du soldat, qui épaulait de nouveau.

Joë se mit à réfléchir rapidement. L’île était grande. Peut-être un peu plus loin n’y avait-il pas de sentinelle et, s’il parvenait à débarquer, qu’importait ou non qu’il fût pris ? Il risquait de contracter la variole, mais cela ne valait-il pas mieux que de retourner vers les pirates de la baie ? Il fit légèrement virer le youyou à tribord et rama de toutes ses forces.

La crique était vaste et le point où il comptait débarquer se trouvait encore à bonne distance. S’il eût été un peu plus marin, il aurait viré dans la direction opposée et ses poursuivants auraient eu ainsi vent debout, tandis que, dans sa position présente, le Dazzler avait un angle de vent qui lui permettait de le rattraper.

Un moment la situation demeura indécise. La brise, légère, soufflait par intermittence, en sorte que tantôt Joë gagnait de la vitesse, tantôt c’était au tour de ceux qui lui donnaient la chasse. Elle se mit à fraîchir lorsque le sloop fut à une centaine de mètres de lui, puis elle tomba brusquement, et la grand-voile du Dazzler s’agita indolemment d’un côté et de l’autre.

« Ah ! Tu as volé le youyou ? Attends un peu ! tonitrua Pete-le-Français, courant dans la cabine chercher son fusil. Tu vas me le payer ! Reviens tout de suite ou je t’abats comme un chien ! »

Mais l’homme savait que le soldat les observait