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— Alors, tentez le coup vous-même.

Le conducteur de chiens prit un solide bâton et s’avança vers Croc-Blanc enchaîné, qui se mit aussitôt à observer le gourdin avec la même attention que prête un lion en cage à la cravache de son dompteur.

— Regardez-moi ses yeux, dit Matt. C’est un bon signe. Il n’est pas bête et se garde bien de s’élancer sur moi. Non, non, il n’est pas sot.

Et comme l’autre main de l’homme s’approchait de son cou, Croc-Blanc se hérissa, gronda, mais se coucha par terre. Il fixait cette main du regard, sans perdre de vue celle qui tenait le gourdin suspendu, menaçant, au-dessus de sa tête. Matt détacha la chaîne du collier et revint en arrière.

Croc-Blanc pouvait à peine croire qu’il était libre. Bien des mois s’étaient écoulés depuis qu’il appartenait à Beauty-Smith et, durant cette période, il n’avait jamais connu un moment de liberté. On le détachait seulement lorsqu’on le menait au combat et, celui-ci terminé, on l’enchaînait derechef.

Il ne savait que faire de lui. Peut-être quelque nouvelle diablerie des dieux se préparait-elle à ses dépens. Il se mit à marcher lentement, précautionneusement, se tenant sans cesse sur ses gardes. Ce qui se passait là était sans précédent. À tout hasard il s’écarta des deux hommes qui l’observaient et se dirigea, à pas comptés, vers la cabane, où il entra. Rien n’arriva. Sa perplexité ne fit qu’augmenter. Il ressortit, fit une douzaine de pas en avant et regarda ses dieux, intensément.

— Ne va-t-il pas s’échapper ? interrogea Scott.