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Un ami commun avait amené Dave, pour une affaire de lotissement de terrains, sur le Mammon-Creek. Mais de cela il ne fut guère question, et le peu de paroles que prononça Dave furent dénuées de toute espèce de sens. La vue de Braise d’Or l’avait, je le jure, soudain rendu fou. Après son départ, le père Chauvet affirma qu’il avait bu. Et c’était vrai. Mais, s’il était ivre, Braise d’Or était l’alcool dont il s’était grisé.

« Cette première entrevue fut décisive. Dave, huit jours après, ne redescendit pas le Yukon, comme il en avait eu primitivement le dessein. Il s’attarda à Dawson durant un mois, puis deux mois, puis durant tout l’été. Et nous tous, qui avions eu, par cette femme, notre part de souffrances, nous nous demandions ce qui allait résulter de l’aventure.

« Notre opinion était que Braise d’Or avait, cette fois, trouvé son maître. Et pourquoi pas ? Dave Walsh était un être romantique, fait à souhait pour conquérir une femme. Il était un vrai Roi de l’Or, célèbre, par tout le pays, pour son endurance et sa stature surhumaines. Chacun, sur son passage, détournait la tête pour l’admirer et disait, à mi-voix, à son voisin : « Voici Dave Walsh ! »

« Et, de fait, Braise d’Or s’éprit pour lui d’amour. Après qu’elle l’eut, tout l’été, fait languir, on apprit qu’ils étaient fiancés.

« L’automne était arrivé et Dave devait s’en retourner au Mammon-Creek, pour le travail de l’hiver. Mais Braise d’Or refusait de se marier déjà. Alors Dave confia ses intérêts à son ami Dusky Burns et continua à traîner à Dawson.

« C’était bien inutile, car Braise d’Or prétendait jouir encore de sa liberté. Oui, telle était sa volonté. Le mariage n’aurait lieu que l’année suivante. Dave accepta d’attendre jusque-là et, dès que le Yukon fut gelé, s’en retourna derrière ses chiens, ne doutant