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de Bondell et, à l’allure d’un chien qui trotte en clopinant, il gagna le poste de police.

— Il y a la, sur le lac, clama-t-il au chef de poste, une pirogue qui vous appartient et qui arrive avec moi du Box-Cagnon. Il y a là-dedans un homme à demi claqué. Rien de grave d’ailleurs. Une grande fatigue, et rien de plus. Vous prendrez soin de lui. Moi, je n’ai pas de temps à perdre. Je vais à Dyea, prévenir l’Athénien. Je vous salue bien.

Et Fred Churchill reprit immédiatement sa course, comme s’il avait eu le diable à ses trousses. Un mille environ séparait le lac Bennet du lac Linderman. Il le couvrit en serrant les dents.

Ce n’eût rien été sans le sac, sur lequel il ne cessait de tenir son attention éveillée, le repassant alternativement de sa main droite à sa main gauche, d’autres fois le mettant sous son bras. Il essaya de le caler sur son épaule, en l’y maintenant d’une main. Mais ce n’était pas pratique. Le sac ballottait et, tandis qu’il courait, lui heurtait la tête ou lui dégringolait dans le dos. Ses doigts enflés et meurtris lâchaient prise à tout moment. Le sac chut à terre plusieurs fois. À lui-même, il advint de trébucher et de s’étaler violemment sur le sol.

Au lac Linderman, il trouva à acheter, pour un dollar, un lot de vieilles courroies dont il se fabriqua une sorte de harnais. Il fréta aussi un canot, qui le transporterait, lui et son colis, à l’autre extrémité du lac. La traversée eut lieu sans encombre et il débarqua sur le rivage opposé, à quatre heures de l’après midi.

C’était le lendemain matin, à sept heures, lui avait-on dit, que l’Athénien devait quitter Dyea. Restaient encore, pour Fred Churchill, vingt-huit