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ment, qu’il ranima. Puis il recommença son même manège.

La température monta légèrement, pendant l’après-midi, et la neige se mit à tomber, fine et dure comme du cristal. Il n’y avait pas de vent. Les blancs flocons descendaient tout droit, en une paisible monotonie.

Morganson se tapit dans un creux du sol, sous l’avalanche inlassable, les yeux fermés, et à demi courbé, la tête sur ses genoux. Il ne pouvait voir, mais ses oreilles montaient la garde.

Mais pas un glapissement de chiens, pas un crissement de traîneaux, pas un cri des conducteurs ne rompait le silence.

Au crépuscule, l’homme rallia sa tente, se coupa une nouvelle provision de bois, mangea deux biscuits et se fourra sous ses couvertures.

Mais il avait insuffisamment mangé. Aussi ne dormit-il que d’un sommeil agité, se retournant sur lui-même a tout moment, en geignant et en grognant. À minuit, il dut se relever et absorber un autre biscuit.

*

Au cours des jours qui suivirent, le froid se fit plus intense.

Morganson constata que quatre biscuits par jour étaient insuffisants à fournir à son corps le calorique nécessaire, en dépit des innombrables tasses de bourgeons de sapin dont, pour soigner son scorbut, il assaisonnait sa nourriture. Il dut augmenter sa ration.

Son menu fut, dès lors, de trois biscuits le matin, de thé à midi, de trois autres biscuits le soir. Entre-temps, de la tisane de bourgeons de sapin, à discrétion.

Il y eut un jour où Morganson se surprit à augmenter la dimension des biscuits qu’il confectionnait. Il 211