Page:London - Constuire un feu, nouvelles, trad Postif et Gruyer, 1977.djvu/108

Cette page a été validée par deux contributeurs.

vante. Le sang se glaça dans ses veines et elle ne put faire un seul mouvement. Elle regarda Dave Walsh qui, comme il l’avait promis, revenait la chercher et s’emparer d’elle.

« C’est bien ce qui arriva. Dave, demeuré debout un instant, perdit presque aussitôt l’équilibre et vint s’abattre sur elle, comme s’il voulait la saisir dans ses bras. Elle fléchit sous le choc, et tous deux s’écroulèrent sur le pont.

« On se précipita pour dégager Braise d’Or, écrasée sous le cadavre. Elle avait perdu connaissance, et plût au ciel qu’elle ne fût jamais revenue à elle ! Car, lorsqu’elle se ranima, elle se mit à hurler comme font les fous. Elle cria ainsi, plusieurs heures durant, sans qu’il fût possible de la calmer, et l’épuisement seul la fit taire.

« Elle est toujours, depuis, demeurée dans les ténèbres. Physiquement, tu l’as vue, elle s’est remise et présente l’aspect d’une personne naturelle. Mais sa raison est perdue.

« Elle a voulu revenir dans cette cabane, que Dave avait construite à leur intention, et où il était mort. C’est là qu’elle l’attend. Elle n’est plus du tout volage. Voilà neuf ans qu’elle demeure fidèle à Dave, et tout porte à croire que fidèle elle lui restera jusqu’à son dernier jour.

Ayant ainsi parlé, Lon Mac Fane alla vers les couvertures disposées pour la nuit, et se prépara à s’y glisser.

— Qui, demandai-je, s’intéresse à elle ?

— Le comte, le vieux père Chauvet et moi. Nous lui apportons, tous les six mois, une provision de nourriture et nous veillons, alternativement, à ce qu’il ne lui manque rien. D’ordinaire, elle ne reconnaît personne. C’est hier, pour la première fois depuis neuf ans, qu’elle m’a appelé par mon nom. Le comte l’aime toujours, et c’est lui le plus à plaindre. Quant à