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en soi, force sociale, force pensante, force artiste, vient du peuple. C’est dans le peuple, encore vierge, toujours persécuté, que se conservent et s’élaborent les antiques vigueurs de notre race. Nos bourgeoisies, épuisées de luxe, dévorées d’appétits énervants, rongées de scepticisme, ne poussent plus que de débiles rejetons inaptes au travail et à l’effort. Jean Lombard avait gardé de son origine prolétaire, affinée par un prodigieux labeur intellectuel, par un âpre désir de savoir, par de tourmentantes facultés de sentir, il avait gardé la foi carrée du peuple, son enthousiasme robuste, son entêtement brutal, sa certitude simpliste en l’avenir des bienfaisantes justices. C’est ce qui lui a permis de vivre sa vie, trop courte, hélas, par les années, trop longue et trop lourde par les luttes où, toujours, il se débattit. Je voudrais que tous ceux qui liront cet article puissent lire un des livres de Jean Lombard, l’Agonie, par exemple. Il est possible que quelques-uns soient choqués par ce style barbare, polychrome, et forgé de mots techniques, pris aux glossaires de l’antiquité, bien que ce style ait vraiment une grande allure, des sonorités magnifiques, un fracas d’armures heurtées, de chars emportés et comme l’odeur même — une odeur forte de sang et de fauves — des