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prisonniers furent ainsi ramasses du 22 au 30 mai. Ils ne séjournaient que quelques heures à Paris, puis on les acheminait sur Versailles. La foule se précipitait pour les voir passer. Ils avançaient, souillés d’ordures, les vêtements en lambeaux, exténués, tête nue sous un soleil ardent, attachés cinq par cinq aux poignets par des cordes au milieu des soldats, chassepot armé. Une corde longitudinale reliait entre elles toutes les cordes transversales des groupes, de façon que tous les prisonniers étaient attachés en bloc. Une évasion était ainsi impossible, et il suffisait d’un peloton pour conduire un convoi assez nombreux[1].

« Tout le monde court du côté des Champs-Elysées, disait le Paris-Journal. Quatre mille prisonniers stationnent sur le milieu de la chaussée, encadrés par des chasseurs d’Afrique, la carabine au poing. Ils regardent, farouches, silencieux, immobiles, fiers d’être haïs à ce point de la foule qui se démène et les injurie. »

Les commandants des détachements avaient pleins pouvoirs. Un convoi de prisonniers attachés dix par dix passait rue d’Amsterdam. Une fantaisie traversa la tête de l’officier : il commanda une

  1. Le Nord.