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été forcé. Nous sommes descendus de l’autre côté de la barricade.

» Je le vois encore. C’était un homme solide. Il était en nage du service qu’il avait fait pendant une demi-heure. — À votre tour, nous dit-il. J’ai mérité d’être fusillé, mais je mourrai en brave. »

» Un autre soldat du corps du général Clinchant me racontait comment sa compagnie avait amené sur les remparts quatre-vingt-quatre insurgés pris les armes à la main.

— « Ils se sont tous mis en ligne, me disait-il, comme s’ils allaient à l’exercice. Pas un ne bronchait. L’un d’eux, qui avait une belle figure, un pantalon de drap fin fourré dans ses bottines et une ceinture de zouave à la taille, nous dit tranquillement : — Tâchez de tirer à la poitrine, ménagez ma tête. — Nous avons tous tiré, mais le malheureux a eu la tête à moitié emportée. »

» Un fonctionnaire de Versailles me fait le récit suivant :

— « Dans la journée de dimanche, j’ai fait une excursion à Paris. Je me dirigeais près du théâtre du Châtelet, vers le gouffre fumant des ruines de l’Hôtel de ville, lorsque je fus enveloppé et entraîné par le torrent d’une foule qui