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teau-d’Eau allait être abandonnée, si quelque membre de la Commune ne venait relever le courage des combattants. Le seul membre de la Commune présent était Gambon, qui reposait exténué dans un coin. Un officier le réveilla et comme il s’excusait, le vieux républicain lui dit simplement : « Autant vaut que ce soit moi qu’un jeune. Moi, j’ai vécu. » Il partit. Mais les balles balayaient le boulevard Voltaire jusqu’à l’église Saint-Àmbroise, et les fédérés furent obligés, dès les premières heures, d’abandonner la position.

Dans cette même nuit, le commandant des chasseurs à pied Segoyer, s’étant trop avancé du côté de la Bastille, fut enlevé et fusillé « sans respect des lois de la guerre, » a dit M. Thiers, comme si depuis trois jours qu’il faisait fusiller sans pitié tous les prisonniers, femmes et enfants, M. Thiers observait dans la guerre d’autre loi que celle des sauvages. On peut dire hautement, à la gloire des fédérés, que ce fut là leur seule exécution militaire. Pendant les six semaines du siège, ils ne mirent à mort aucun des Versaillais faits prisonniers dans les combats. Pendant qu’on éventrait leurs cantinières sur les champs de bataille et qu’on fusillait leurs médecins, porteurs de la croix de Genève, les