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pas moins pendant cinq ans garde national mobile, c’est-à-dire obligé de marcher en temps de guerre. Ainsi Jacques servira neuf ans et demi ; Pierre, pendant cinq ans, sera, à la première fantaisie guerrière de Napoléon III, envoyé à la frontière.

Cent mille Jacques enlevés à vingt ans à leurs foyers. Vingt ans, l’heure où la sève monte. Chez eux, livrés à leurs travaux, ils se suffisaient et au delà ; ils vivront désormais sur le fonds commun. L’État paiera leur entretien, mais qui paiera l’État si ce n’est la bourse du père appauvri par l’absence de son fils ?

Ces milliers d’hommes se seraient mariés. Étant les plus beaux gars, car la conscription prend le dessus du panier, ils auraient fait de beaux enfants, sains et robustes. — Seront-ils les mêmes après une guerre ou cinq années d’oisiveté de garnison ?

Ces milliers de Jacques pensaient autrefois comme nous, leurs amis, leurs voisins, — Leurs affections, leurs intérêts, leurs lois étaient les nôtres. Entretenus par la communauté que leur fait maintenant l’abondance ou la misère ? Ils n’ont plus qu’un conseil, la consigne, qu’une loi,