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HISTOIRE DE LA COMMUNE DE 1871

défense intérieure. Delescluze étendit les pouvoirs des trois généraux jusqu’aux quartiers de la ville qui confinaient à leurs commandements, licencia le bataillon des barricadiers qui ne rendait pas de services, confia ses travaux au génie militaire. La plupart de ses arrêtés furent lettre morte ou se croisèrent avec d’autres. Quand le délégué offrait 3  fr.  50 aux terrassiers, le Comité de salut public, à la même colonne de l’Officiel, offrait 3  fr.  75.

Le Comité de salut public collaborait à la défense par un décret obligeant les Parisiens à se munir d’une carte civique dont tout garde national pourrait requérir l’exhibition, décret aussi inexécutable et aussi inexécuté que celui sur les réfractaires. L’Hôtel-de-Ville n’inspirait de terreur à personne. Derrière ces grosses voix on sentait l’impuissance. Des bataillons ayant cerné la Banque pour perquisitionner, le père Beslay s’était mis en travers et les terribles dictateurs du Comité avaient désavoué leur agent. Le public souriait. Un dernier coup et c’était fait de l’autorité de la Commune ; il vint de la minorité.

Elle était véritablement maltraitée. Déjà quand il s’agit de remplacer Delescluze, la majorité avait préféré à Varlin un homme tout à fait indigne, Billioray ; depuis elle avait éliminé Varlin de l’intendance, Vermorel de la sûreté. Longuet de l’Officiel. Irritée et très inquiète aussi du désordre grandissant, elle voulut dégager sa responsabilité, le fit dans un manifeste apporté à la séance du 15. La majorité avertie ne vint pas, à l’exception de quatre ou cinq membres. La minorité fit constater l’absence et, au lieu d’attendre la réunion suivante, envoya sa déclaration aux journaux : « La Commune, disait-elle, a abdiqué son pouvoir entre les mains d’une dictature à laquelle elle a donné le nom de Comité de salut public… La majorité s’est déclarée irresponsable par son vote. La minorité affirme au contraire que la Commune doit au mouvement révolutionnaire d’accepter toutes les responsabilités… Quant à nous, nous revendiquons le droit de répondre seuls de nos actes sans nous abriter derrière une suprême dictature. Nous nous retirons dans nos arrondissements. »

Grande faute et sans excuse. La minorité n’avait pas