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HISTOIRE DE LA COMMUNE DE 1871

pas changé de Saint-Ouen à Neuilly où l’on se fusillait sur place ; elle devenait grave à partir de la Muette. La batterie de Montretout, celle de Meudon, le Mont-Valérien, couvraient Passy d’obus et entamaient profondément le rempart. Les tranchées des Versaillais couraient de Boulogne à la Seine. Leurs tirailleurs serraient le village d’Issy et occupaient les tranchées entre le fort et celui, de Vanves qu’ils cherchaient à couper de Montrouge. L’incurie de la défense restait la même. Les remparts, depuis la Muette jusqu’à la porte de Vanves, étaient à peine armés ; les canonnières soutenaient presque seules le feu de Meudon, de Clamart, du Val Fleury.

Le premier acte du nouveau Comité fut d’ordonner la démolition de la maison de M. Thiers, suggérée par Arthur Arnould. Cette étourderie valut au bombardeur un petit palais que l’Assemblée rurale lui vota le lendemain. Ensuite le Comité lança sa proclamation : « La trahison s’était glissée… »

Delescluze en fit une de son côté. Il se traînait, haletait, pouvait bien dire : « Si je ne consultais que mes forces, j’aurais décliné cette fonction. La situation est grave… mais quand j’envisage le sublime avenir qui s’ouvrira pour nos enfants, lors même qu’il ne nous serait pas donné de récolter ce que nous avons semé, je saluerais encore avec enthousiasme la révolution du 18 Mars. »

En entrant au ministère, il trouva le Comité Central élaborant aussi une proclamation : « Le Comité Central déclare qu’il a le devoir de ne pas laisser succomber cette révolution du 18 Mars qu’il a faite si belle… Il brisera impitoyablement toutes les résistances… Il entend mettre fin aux tiraillements, vaincre le mauvais vouloir, faire cesser les compétitions, l’ignorance et l’incapacité. » C’était parler plus haut que la Commune et se flatter hors de mesure.

La première nuit, il fallut réparer un désastre. Le fort de Vanves, sur lequel se concentraient tous les feux dirigés auparavant contre celui d’Issy, était devenu presque intenable et son commandant l’avait évacué. Wroblewski prit le commandement des mains de La Cécilia malade, et, dans la nuit du 10 au 11, accourut