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« Il est bien entendu qu’à la liquidation du Mont-de-Piété doit succéder une organisation sociale qui donne aux travailleurs des garanties réelles de secours et d’appui en cas de chômage. L’établissement de la Commune commande de nouvelles institutions réparatrices qui mettent le travailleur à l’abri de l’exploitation du capital. »

Le décret qui abolissait les retenues sur les appointements et les salaires mettait fin à une des plus criantes iniquités du régime capitaliste, ces amendes étant infligées, souvent sous le plus futile prétexte, par le patron lui-même qui se trouve ainsi juge et partie.

Le décret relatif aux ateliers abandonnés restituait à la masse dépossédée la propriété de son travail. Une commission d’enquête, nommée par les chambres syndicales, devait dresser la statistique et l’inventaire des ateliers abandonnés qui allaient revenir aux mains des travailleurs. Ainsi, « les expropriateurs devenaient à leur tour les expropriés. » Le XXe siècle verra cette révolution. Chaque progrès du machinisme la rapproche. Plus l’exploitation se concentre dans quelques mains, plus l’armée du travail se tasse et se discipline ; bientôt, la classe des producteurs, consciente et unie, ne trouvera plus devant elle qu’une poignée de privilégiés, comme la jeune France de 89. Le plus acharné révolutionnaire socialiste, c’est le monopolisateur.

Sans doute, ce décret contenait des lacunes et appelait de sérieuses explications, surtout à l’article des associations coopératives auxquelles devaient revenir les ateliers. Il n’était pas, non plus que l’autre, applicable à cette heure de bataille et il nécessitait une foule de décrets latéraux ; il donnait au moins quelque idée des revendications ouvrières, et, n’eût-elle à son avoir que la création de la commission du Travail et de l’Échange, la révolution du 18 mars aurait plus fait pour le travailleur que jusqu’alors toutes les Assemblées bourgeoises de la France depuis le 5 mai 1789.

La délégation du Travail voulut voir clair dans les marchés de l’Intendance. Elle démontra que les rabais pèsent sur la main-d’œuvre et non sur les bénéfices des entrepreneurs qui soumissionnent à n’importe quel