Page:Lissagaray - Histoire de la Commune de 1871, MS.djvu/135

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de faire tous nos efforts pour obtenir du Gouvernement des élections municipales à bref délai. » — « Très bien, répondent les délégués, mais nous gardons nos positions, il nous faut des garanties. » Députés et maires s’acharnent, prétendent que Paris se remette à discrétion entre leurs mains. Jourde va se retirer, quelques adjoints le retiennent encore. Un instant on paraît s’entendre : — le Comité remettra les services administratifs aux maires qui occuperont une partie de l’Hôtel-de-Ville ; il continuera d’y siéger, conservera la direction exclusive de la garde nationale et veillera à la sûreté de la ville. — Il ne reste qu’à affirmer l’accord par une affiche commune, la discussion se ranime plus violente quand il s’agit de la formule. Les délégués veulent : « Les députés, maires et adjoints, d’accord avec le Comité Central. » Ces messieurs, au contraire, prétendent rester masqués. Tirard, Schœlcher déclament contre les délégués. Il y eut l’intermède comique. Subitement, tel un coucou qui jaillit de l’horloge, Louis Blanc, jusqu’alors concentré, se dressa sur ses petits talons, battit des bras, retrouva ses airs du 16 Mars 48 et glapit des malédictions : « Vous êtes des insurgés contre l’Assemblée la plus librement élue — c’était le mot de Thiers. Nous, mandataires réguliers, nous ne pouvons avouer une transaction avec des insurgés ! Nous voulons bien prévenir la guerre civile, mais non paraître vos auxiliaires aux yeux de la France. » Jourde répondit à l’homoncule que cette transaction, pour être acceptée du peuple de Paris, devait être consentie ouvertement, et, désespérant d’en rien tirer, il quitta la réunion.

Dans cette élite de la bourgeoisie libérale, anciens proscrits, avocats, annalistes révolutionnaires, aucune voix indignée n’éclata : « Cessons ces cruelles disputes. Vous, Comité Central qui parlez à Paris, nous que la France républicaine écoute, nous allons établir, délimiter le champ précis de nos revendications. Vous apportez la force, l’aire ; nous vous donnerons l’expérience des réalités inexorables. Nous présenterons à l’Assemblée cette charte pratique, également respectueuse des droits de la nation, des droits de la cité. Et quand la France verra Paris debout, bien équilibré de pensée et