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Mais commedes troupes, quand elles trouvent surtout un peu de résistance, ne sauraient battre sans se rompre, l’ennemi ayant encore une ligne de formée, ce général fit arrêter la sienne, et lui ordonna de se réformer. Alors, tournant la tête, il, voulut faire avancer la seconde ligne mais celui qui la commandait avait pris à la lettre l’ordre de rester, qui ne lui avait été donné que pour le temps nécessaire à former la ligne (le général comptant qu’aussitôt qu’elle l’aurait été, il ne manquerait pas de suivre à proportion du terrain que la première gagnerait), et comme en battant celles des ennemis, Je général s’était éloigné de plus de trois cents toises de l’endroit où il avait ordonné à l’officier de se former, et que sa première ligne, dans le désordre où elle était, ne se trouvait qu’à trente toises de celles de l’ennemi, si celui qui les commandait se fût mis à marcher à cette ligne rompue il l’eût infailliblement battue sans qu’elle eût pu faire de résistance ; mais il donna le temps à la seconde d’arriver. Le général la fit passer dans les intervalles de sa première, et battit de nouveau les ennemis, qui, dans cette occasion, firent la même faute que M. Gléen à Nordlingen, lequel, après avoir poussé la première ligne de M. de Turenne, lui donna le temps de se réformer, et d’attendre que les Hessois, qui étaient à six cents pas derrière, fussent arrivés, et par là, au lieu de battre, fut battu. Cependant cela arrive à M. Gléen qui était un général estimé ; et le lieutenant général dont je viens de citer l’exemple, et qui avait été chargé de former promptement une seconde ligne, était aussi parmi nous un homme de réputation.


Des différentes sortes de guerres décrites par M. de Turenne.

Si l’on trouve à profiter au récit que M. de Turenne fait du combat de Nordlingen, il ne sera pas moins utile de rapporter encore la relation qu’il fait des combats de Fribourg. Rien n’est plus capable de donner à Connaître combien il est difficile à ceux mêmes qui sont présens aux actions, mais qui ne sont pas dans le secret, et ne peuvent par conséquent savoir ce qui fait agir un généra ! d’une manière plutôt que d’une autre, d’approcher de l’exactitude et de la précision avec laquelle M. de Turenne rend compte des combats de Fribourg, lui qui, conjointement avec M. le Prince et M. le maréchal de Grammont, conduisait tout.


De la différence qu’il y a des guerres qui se faisaient alors à celles d’aujourd’hui.

La France, avant la paix des Pyrénées, avait été longtemps tourmentée par des guerres civiles occasionnées par la religion ou par d’autres causes, et souvent elle avait en même temps des guerres étrangères à soutenir. Le feu roi (Louis XIV) avait peu de places fortifiées sur ses frontières ; les armées étaient petites, ses revenus peu considérables par rapport à ce qu’ils sont devenus depuis, et même, dans le temps de guerres civiles, ses troupes étaient seulement payées par les provinces qui étaient restées dans l’obéissance. Les autres fournissaient à l’entretien des troupes de leur parti et ces armées, de part et d’autre, vivaient plutôt de brigandages que de soldes réglées ; elles passaient d’une province à l’autre pour chercher à subsister, sans avoir de magasins qui leur four-