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céder la place. Le vieillard ne voulut pas entendre parler du projet qu’avait sa fille d’entrer au couvent ; il dit qu’elle était trop nécessaire à son bonheur, et il ne fut pas difficile de la décider à abandonner son dessein. Mais aucun raisonnement ne put faire renoncer Théodore au plan que j’avais d’abord tracé pour lui. Il s’était sincèrement attaché à moi pendant mon séjour à Strasbourg, et quand je fus sur le point d’en partir, il me supplia en pleurant de le prendre à mon service ; il exposa tous ses petits talents sous les couleurs les plus favorables, et s’efforça de me convaincre qu’il me serait infiniment utile en route. Je ne me souciais guère de me charger d’un garçon d’à peine treize ans, qui ne serait qu’un embarras pour moi ; cependant, je ne pus résister aux prières d’un enfant si affectionné, et qui réellement possédait mille qualités estimables. Il décida, non sans peine, ses parents à lui permettre de me suivre, et, une fois leur consentement obtenu, il fut décoré du litre de mon page. Après une semaine passée à Strasbourg, Théodore et moi nous partîmes pour la Bavière, en compagnie du baron et de sa femme. Ces derniers, ainsi que moi, avaient forcé Marguerite à accepter des cadeaux de prix pour elle-même et pour son plus jeune fils. En la quittant, je lui promis positivement de lui rendre Théodore au bout d’une année.

« Je vous ai conté tout au long cette aventure, Lorenzo, afin de vous faire bien connaître les moyens dont s’est servi « l’aventurier Alphonso d’Alvarada pour s’introduire dans le château de Lindenberg. » Jugez d’après cet échantillon, de la foi qu’il faut ajouter aux assertions de votre tante.