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et de mon imprudence, votre intercession le décidera à me pardonner et à prendre soin de ses infortunés petits-fils. Si vous m’obtenez cette faveur, vous m’aurez rendu un service qui surpassera mille fois le mien. »

« Le baron et moi nous assurâmes Marguerite que nous n’épargnerions rien pour obtenir sa grâce, et que, lors même que son père serait inflexible, elle ne devait avoir aucune crainte sur le sort de ses enfants : je m’engageai à me charger de Théodore, et le baron promit de prendre le cadet sous sa protection. La mère pleurait de reconnaissance en nous remerciant de ce qu’elle appelait notre générosité, mais qui, après tout, n’était que le sentiment de nos obligations. Puis elle quitta la chambre pour coucher son petit enfant, qui était excédé de fatigue et de sommeil.

« La baronne, lorsqu’elle revint à elle et qu’elle sut les dangers dont je l’avais sauvée, ne mit pas de bornes à l’expression de sa gratitude ; son mari se joignit à elle avec tant de chaleur pour me prier de les accompagner à leur château en Bavière, qu’il me fut impossible de résister à leurs instances. Pendant une semaine que je passai à Strasbourg, les intérêts de Marguerite ne furent point oubliés. Dans notre visite à son père, nous réussîmes aussi complètement que nous pouvions le désirer. Le bon vieillard avait perdu sa femme ; il n’avait point d’autre enfant que cette fille infortunée, dont il n’avait pas de nouvelles depuis près de quatorze ans. Il était entouré de parents éloignés qui attendaient sa mort avec impatience pour entrer en possession de son argent. — Lors donc que Marguerite parut si inopinément, il la considéra comme un présent du ciel ; il la reçut elle et ses enfants à bras ouverts, et insista pour qu’ils s’établissent chez lui sans délai. Les cousins, désappointés, furent obligés de