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à force d’aimer

je recevrai comme une inappréciable faveur les moindres parcelles d’affection que vous voudrez bien me donner. »

Sa voix, dont la dureté d’inflexion semblait d’abord vouloir établir l’irrévocable, décourager tout désir opposé au sien, s’amollit vers la dernière phrase. Le regard aussi changea, et l’acier noir des prunelles se fondit en un velours de caresse. Hélène en sentit jusqu’à ses plus lointaines fibres l’effleurement qui la brisait. Elle trouva cependant en elle-même une force qu’elle n’y soupçonnait pas.

— « Moi aussi, je serai franche et loyale envers vous, » dit-elle avec un calme extérieur sous lequel toute sa nature se convulsait de désir et de désespoir. « Vous avez vos raisons pour ne pas vous marier, Horace, et moi j’ai résolu de ne me donner encore que dans le mariage. Ma première faute m’en interdit une seconde. C’est le contraire de ce que vous pensez, je le vois. Mais vous vous trompez en croyant que je me suis mise délibérément et de mon plein gré au-dessus des exigences sociales. Dans tous les cas, je ne suis plus libre de le faire, puisque j’ai un fils. Les conséquences de mes actions ne retombent plus désormais sur moi seule. »

Le dilettante moral qu’était Horace goûta profondément la beauté de cette réponse, que rehaussait la simplicité de l’attitude et du lan-