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à force d’aimer

Mais votre fils a besoin d’un protecteur, d’un père. Je serai tout cela pour lui, si vous devenez ma femme.

— Je ne puis pas vous épouser. »

Horace tressaillit, et, détournant la tête, se remit à marcher en silence. S’il avait laissé son visage face à face avec celui d’Hélène, peut-être celle-ci eût-elle vu s’y peindre un reflet de singulier espoir. Le philosophe socialiste n’était, ni théoriquement ni pratiquement, un partisan du mariage. Qu’un obstacle l’empêchât de donner son nom à cette femme, cela n’était pas pour le désobliger outre mesure, puisqu’elle l’aimait.

La surprise, le sentiment d’une satisfaction un peu inconvenante, quelque légère angoisse aussi, le retenaient d’interroger.

Au même instant, chez Hélène, renaissait la confiance. Elle ne pleurait plus. Son effort de loyauté la grandissait intérieurement, l’exaltait. Nul doute que les yeux épris ne la vissent tout à l’heure à la hauteur où elle s’apercevait elle-même. D’ailleurs la sincérité de son nouvel amour effaçait, lavait l’ancien jusqu’à le lui rendre inconcevable. La puissance d’oubli qu’ont les femmes lui ôtait toute notion de solidarité avec sa personne d’autrefois. Qu’importerait à Horace un passé qui, pour elle, n’existait plus ?

Ainsi, durant les quelques pas qu’ils firent sans parler, tellement proches par le frôlement et le