Page:Lesueur - À force d'aimer, 1895.djvu/64

Cette page a été validée par deux contributeurs.
60
à force d’aimer

glantes. Plus haut, il semblait un lac de lumière verte et frissonnante. Puis, au zénith, il étendait un crêpe violet semé de points d’or. Au-dessous de la maison, dans l’ombre tiède, un quartier de Clermont se tassait. Parfois, de toutes ces existences invisibles une voix montait, un appel indistinct, un rire lointain, un hennissement ou un aboi de bête. Ensuite l’immensité semblait plus vaste et le silence plus profond.

Hélène sentait la joie de son cœur se dilater jusqu’à remplir l’espace. Elle était si grande, cette joie, qu’elle montait aux étoiles. Tout le paysage en exprimait l’ivresse. Un peu de son bonheur flottait tout là-bas, avec le dernier rayon qui blanchissait l’observatoire au sommet du Puy de Dôme. La jeune femme eût voulu embrasser d’une étreinte cette beauté de choses qui s’harmonisait avec les délices de ses sentiments. Et son regard extasié caressait les couleurs et les contours inoubliables, tandis qu’elle prêtait l’oreille à la voix d’Horace.

Elle était venue seule, sans son petit René. L’enfant avait passé la journée à la campagne, chez la nourrice qui l’avait élevé jusqu’à trois ans. Sans doute, à cette heure-ci, la brave femme l’avait déjà ramené au logis, et la bonne le couchait. Hélène irait le rejoindre dans un instant. M. Fortier l’accompagnerait-il ?… Elle se voyait marchant à son côté par les avenues assombries. Ce serait