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t-elle. « Je ne crois pas mon père coupable… Mais on l’accuse. Pouvais-je garder ces millions qu’à tort ou à raison des malheureux lui réclamaient en le maudissant ? Quelques voix consolées s’élèveront maintenant pour le défendre… Car j’ai déclaré que j’exécutais sa volonté dernière. N’en auriez-vous pas fait autant ?

— Que je vous aime !… que je vous aime !… Ah ! que je suis heureux !… » balbutiait René.

Il délirait de joie en apprenant le dépouillement volontaire de sa fiancée, la perte irréparable de ces millions qu’un autre eût peut-être, secrètement au moins, regrettés.

— « Mon maître Fortier approuvera maintenant mon amour, » disait-il. « Vous serez sa fille. Il sera notre guide. Et, à nous trois, nous ferons de grandes choses. »

Il se releva de sa position prosternée et fervente. Puis, tous deux, s’entretenant d’amour et d’avenir, se dirigèrent du côté de la plage.

À la lisière du bois de pins, ils se tinrent debout, enlacés, le cœur gonflé de leur tendresse, immense comme la mer sans bornes, qui, tout à coup, se déployait devant eux.

La sensation de l’infini dans la nature et dans leur âme les pénétrait d’une surhumaine ivresse. Et René dit :

— « Ô ma Germaine ! quelle destinée est la nôtre !… Nous possédons le bonheur suprême, et