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à force d’aimer

s’expliquer sans laisser s’égarer les soupçons de l’autre. « Je ne sais pas ce que vous venez faire ici. Mais le seul fait que vous mettez les pieds dans ce journal est une lâcheté de votre part. Vous appartenez au parti que nous attaquons. Votre patron actuel et celui que vous avez servi ont été récemment menacés par nous de révélations foudroyantes. Que venez-vous donc faire chez nous, si vous n’êtes pas envoyé par eux pour acheter notre silence ? Donc votre démarche me déplaît, et je vous chasse !… »

Chanceuil fut tellement abasourdi par cette accusation, toute contraire à celle qu’il attendait, que, sans relever les expressions offensantes de son agresseur, il tenta de remettre la situation dans son vrai jour :

— « Monsieur, » dit-il, « si vous n’êtes pas absolument fou, dans un instant vous me ferez des excuses. Je ne connais qu’un directeur à ce journal, et ce directeur, c’est M. Fortier. Lui seul aurait le droit de m’interdire ses bureaux, et il y songe si peu qu’il est en négociation avec moi pour une affaire qu’il considère comme du plus haut intérêt. Je ne l’autorise pas à vous la confier. Mais il vous dira du moins qu’elle est absolument en opposition avec les intentions que vous me supposez.

— Vous mentez, » dit René tranquillement.

Une seconde fois la canne de Chanceuil se