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à force d’aimer

profonde, nuancée, d’une gravité saisissante, alla troubler, comme une caresse, les nerfs excitables de toutes ces curieuses de sensations, qui tendaient vers lui leurs têtes savamment ondulées, où papillonnaient des aigrettes.

Parmi tous ces visages de Parisiennes, d’une grâce un peu artificielle et uniforme, deux jeunes physionomies attiraient les yeux par le contraste et l’imprévu de leur beauté.

Huguette et Germaine — qui se trouvaient, avec Mlle Bjorklund, dans la loge de M. Vallery — possédaient en effet, l’une et l’autre, un charme bien personnel, échappant à l’art du coiffeur et de la modiste. À voir la suavité de la tête blonde et la grâce passionnée de la tête brune, on eût dit d’une Vierge de Botticelli fraternisant avec une Salomé de Gustave Moreau. Le cadre rouge de la loge réunissait en un seul tableau ces deux types de jeunes filles, dont l’un rappelait la candeur des Primitifs et l’autre l’inquiétante ardeur de certains artistes espagnols.

On ne s’étonna guère, dans la salle, d’observer qu’à de fréquentes reprises les yeux du conférencier se levèrent de ce côté-là. Quel aimant qu’une pareille vision pour les regards d’un homme de cet âge, dont la jeunesse se manifestait fougueuse en une parole vibrante et des idées hardies !

Mais nul ne supposa qu’il parlait seulement pour ces deux jeunes filles, et que les applaudis-