Page:Lesueur - À force d'aimer, 1895.djvu/160

Cette page a été validée par deux contributeurs.
156
à force d’aimer

— Je ne les oublierai pas, » reprit Horace. « Et surtout je tâcherai que René s’y élève sans passer par ma criminelle expérience. Il sera plus digne que moi de devenir un novateur. J’empêcherai qu’il fasse jamais à une femme le mal que j’ai fait à sa mère. »

À partir de cet instant, la pensée de son fils adoptif devint prédominante dans l’esprit d’Horace. Le lendemain matin, ce fut lui qui voulut aller chercher le petit garçon chez la nourrice, à Fontanat.

Même pour cette mission, où le cœur le plus délicatement tendre ne pouvait prendre que des précautions de bourreau, Mme Giraudet eut plus de confiance en M. Fortier qu’en elle-même.

Si elle l’avait entendu, pendant le retour en voiture, envelopper de force morale en même temps que d’infinie sympathie le petit être impressionnable qu’il préparait au pire des malheurs, elle n’eût pas regretté sa décision.

Pourtant, elle-même crut défaillir de pitié, quand elle vit, devant la grille du jardin, descendre de fiacre cette petite silhouette gauche, trébuchante, secouée de sanglots, que les fermes bras d’Horace soutenaient, emportaient presque. Elle vint au-devant de René, tâcha d’écarter le mouchoir où se cachait le charmant visage défiguré, gonflé par les larmes.

— « Mon pauvre petit !… Mon mignon !…