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effrayant abîme… Je ne sais pas si j’eus pitié de mes maîtres ou de moi, toujours est-il que, voyant la mort imminente, je m’élançai de ma selle sur le timon et me cramponnai à son extrémité… Je ne sais pas non plus combien je pesais alors ; quoi qu’il en soit, le poids de ma personne ajouté comme surcroît exerça une telle pression sur les timoniers, qu’ils commencèrent à râler et… je n’aperçois plus mes chevaux de volée ; ils ont disparu, comme si on les avait détachés net de l’attelage ; je me trouve suspendu au-dessus du vide, mais l’équipage est encore là, maintenu en place par les timoniers que j’ai mis dans l’impossibilité d’avancer.

Alors seulement j’eus conscience de ma position ; épouvanté, je lâchai le timon et je tombai dans l’abîme ; à partir de ce moment je ne me rappelle plus rien. Je ne saurais dire combien de temps dura mon évanouissement. En revenant à moi, je me vis dans une isba, où se trouvait un moujik de bonne mine,