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monstre, que de vous donner du chagrin ; je vous enverrai chez votre père, vous y resterez, et votre pauvre Bête en mourra de douleur. — Non, lui dit la Belle en pleurant ; je vous aime trop pour vouloir causer votre mort : je vous promets de revenir dans huit jours. Vous m’avez fait voir que mes sœurs sont mariées et que mes frères sont partis pour l’armée ; mon père est tout seul, souffrez que je reste chez lui une semaine. — Vous y serez demain au matin, dit la Bête ; mais souvenez-vous de votre promesse. Vous n’aurez qu’à mettre votre bague sur une table, en vous couchant, quand vous voudrez revenir. Adieu, la Belle. » La Bête soupira selon sa coutume en disant ces mots, et la Belle se coucha toute triste de l’avoir affligée.

Quand elle se réveilla le matin, elle se trouva dans la maison de son père, et, ayant sonné une clochette qui était à côté de son lit, elle vit venir la servante, qui fit un grand cri en la voyant. Le bonhomme accourut à ce cri et manqua mourir de joie en revoyant sa chère fille, et ils se tinrent embrassés plus d’un quart d’heure.

La Belle, après les premiers transports, pensa qu’elle n’avait point d’habits pour se lever ; mais la servante lui dit qu’elle venait de trouver dans la chambre voisine un grand coffre plein de robes toutes d’or, garnies de diamants. La Belle remercia la bonne Bête de ses attentions : elle prit la moins riche de ces robes, et dit à la servante de serrer les autres, dont elle voulait faire présent à ses sœurs ; mais à peine eut-elle prononcé ces paroles, que le coffre disparut. Son père lui dit que la Bête voulait qu’elle gardât tout cela pour elle ; et aussitôt les robes et le coffre revinrent à la même place.