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et la reine répondirent par trois antres, et ils allaient commencer leur harangue, lorsqu’on vit arriver une femme d’une figure majestueuse, tenant par la main un jeune homme de quatorze à quinze ans, et qui, adressant la parole à Gillette, lui parla ainsi :

« Reine, tout vient à point à qui peut attendre. Vos malheurs sont finis, et votre destin a changé de face ; on a su dérober à la méchanceté de Gangan le prince que voici. Cette perfide fée ne peut plus lui nuire, et sa malice vient d’être confondue. Reconnaissez donc en lui Cadichon ; et vous, députés, rendez hommage au légitime successeur de vos États. »

Alors le roi, reconnaissant son fils, le prit dans ses bras et le baisa mille fois ; puis, sautant au cou de la fée, il l’embrassa sans aucun égard pour son âge ni pour son caractère ; il en fit de même à sa femme, à Caboche, au procureur fiscal, au receveur et à tout ce qui se trouva autour de lui ; après quoi, ôtant son manteau royal, il le mit sur les épaules de Cadichon, lui donna son sceptre, l’assit sur le pied du lit, et se prit à crier de toutes ses forces : Vive le roi ! Ce qui fut répété sur-le-champ par les grands et ensuite par tout le peuple, à qui le roi dit plusieurs fois : « Criez donc, vous autres ! »

Cependant la reine, pénétrée de joie et de reconnaissance, était tombée aux genoux de la fée, qu’elle embrassait en pleurant ; et la fée, après l’avoir relevée, fit signe qu’elle voulait parler. Chacun prêta silence, excepté le roi, dont la joie était si grande, qu’il ne voyait, pour ainsi dire, ni n’entendait rien ; enfin, se trouvant hors d’haleine, il se tut, et la fée continua ainsi :