Page:Lescure - Le Monde enchanté.djvu/499

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les rois, puisque leurs statues les représentaient toujours ainsi. On soutint son sentiment ; on cria, on se querella, et on aurait peut-être été plus loin, si le roi, en élevant la voix plus haut qu’eux tous :

« Finirez-vous donc, vous autres ? leur dit-il ; voilà bien du bruit pour une chaise de plus ou de moins ! Comme je serai, ils me verront ; et comme ils me trouveront, ils me prendront ; voilà tout ce que j’y fais : mais pour être leur roi, grand merci ; je deviendrais fou, avec tous les tracas de royauté qu’ils m’ont dit que j’aurais sur les bras. Vive, vive mon petit royaume ! puisque j’y suis bien, je m’y tiendrai : ainsi, qu’ils s’accommodent. Cependant, puisqu’ils veulent avoir une audience, il faut la leur donner ; partant, qu’on les fasse venir. »

Chacun se retira en murmurant tout haut de ce que le roi n’avait pas choisi son avis, et en le blâmant de vouloir en faire toujours à sa tête.

Pendant qu’on était allé chercher les députés, Sa Majesté, croyant penser bien mieux que ceux de son conseil, prit ses habits royaux, et s’assit sur le pied de son lit, dont il avait fait relever les rideaux en festons autour des colonnes torses. Il tenait d’une main son sceptre, et de l’autre sa toque et ses gants à frange ; la reine était à sa droite, sur une chaise de serge bleue garnie de gros clous dorés, et ses femmes étaient derrière elle. À la gauche du roi, on voyait ses grands officiers, qui presque tous riaient sous leur chapeau de la figure singulière de leur roi.

Quand tout fut arrangé, on ouvrit la porte, et les députés entrèrent, suivis de tout le peuple du royaume de Pétaud. Ils lui firent trois profondes révérences, auxquelles le roi